La réforme du droit successoral suisse : les modifications attendues entrent en vigueur en 2023 (article de janvier 2022).

Alexandre Bardot, avocat associé, docteur en droit (Université de Genève), Lemania Law Avocats

De nouvelles dispositions apportant plus de flexibilité en matière de planification successorale entreront en vigueur dans une année, le 1er janvier 2023.

La révision la plus marquante concerne les réserves successorales, puisque celles-ci limitent considérablement la liberté du testateur et lui empêchent par exemple de déshériter un enfant ou de réduire sa part à portion congrue.

A compter de l’année prochaine, la réserve des descendants ne s’élèvera plus qu’à la moitié, contre trois-quarts aujourd’hui de leur part légale. Quant à la réserve des parents, celle-ci disparait tout simplement, alors qu’elle est aujourd’hui de moitié de leur part légale. Enfin, la réserve du conjoint ou du partenaire enregistré survivant demeurent identiques au régime successoral actuel, à savoir de moitié de leur part légale.

Il sera donc toujours possible de disposer librement d’au moins la moitié de sa succession, ce qui permet par exemple de favoriser le partenaire de vie, ses enfants ou des tiers ou bien tout simplement attribuer une part plus substantielle de sa succession à certains de ses héritiers.

Plus précisément, lorsque le défunt était marié ou vivait sous le régime du partenariat enregistré en présence de descendants, son conjoint ou partenaire enregistré ainsi que les descendants ont chacun droit à une part légale de 1/2 de la succession. Seule la moitié de la succession sera concernée par les réserves, alors qu’actuellement celle-ci est de 5/8. Dans l’hypothèse où le défunt n’était ni marié ni dans un partenariat, la part légale de ses descendants représente la totalité de la succession et leur réserve s’élèvera à la moitié, contre trois-quarts aujourd’hui. En l’absence de descendants cette fois, le défunt marié ou vivant en partenariat enregistré, la réserve sera de 3/8 et la quotité disponible à 5/8.

Les dispositions révisées s’appliquent à toutes les successions postérieures au 1er janvier 2023 et s’appliquent en particulier aux testaments et aux pactes successoraux déjà constitués. La suppression de la réserve a également des conséquences, en cas de procédure de divorce en cours. En effet, selon les dispositions en vigueur actuellement, le conjoint tout comme le partenaire enregistré ne perdent le droit à leur part légale et à leur réserve, qu’après l’entrée en force d’un jugement de divorce. A compter de l’année 2023, le conjoint ou partenaire enregistré survivant n’aura plus droit à sa part légale dans l’hypothèse où l’autre conjoint ou partenaire décède en cours de procédure de divorce ou séparation, pour autant que cette procédure ait été introduite ou poursuivie sur requête commune ou qu’ils aient vécu séparément pendant deux ans.

Toutefois, jusqu’à l’entrée en force du jugement de divorce ou de séparation, le droit à leur réserve subsiste ; une disposition pour cause de mort permet au testateur de surmonter cet écueil.

En conclusion, la réduction des réserves permet au testateur une liberté plus importante dans l’attribution de sa succession et facilite notamment les transmissions d’entreprises intra-familiale. Il est par ailleurs opportun de réexaminer les testaments et les pactes successoraux existants.

A compter de l’année 2023, le conjoint ou partenaire enregistré survivant n’aura plus droit à sa part légale dans l’hypothèse où l’autre conjoint ou partenaire décède en cours de procédure de divorce ou séparation, pour autant que cette procédure ait été introduite ou poursuivie sur requête commune ou qu’ils aient vécu séparément pendant deux ans.